vendredi 4 janvier 2008

Bons points, images et bonnets d'âne


Dans une démarche très inhabituelle, chaque ministre sera évalué dans son action selon une grille de critères chiffrés, ce qui pourrait les obliger à redoubler d'efforts pour ne pas faire les frais d'un éventuel remaniement.

Construction de logements sociaux, nombre de brevets déposés ou encore accueil des élèves handicapés: les 15 ministres ainsi que le Haut commissaire aux Solidarités actives Martin Hirsch devront régulièrement "rendre des comptes" à François Fillon, qui les recevra individuellement prochainement.

Le député socialiste Pierre Moscovici a qualifié vendredi de "gadget dangereux" le système d'évaluation des ministres annoncé la veille par le gouvernement. "Je pense que c'est un gadget, mais un gadget dangereux et qui porte atteinte à la responsabilité du gouvernement devant le Parlement, qui doit être le seul à même de le contrôler", a déclaré M. Moscovici sur RMC. "Quand à l'action, c'est à la Cour des comptes de la juger", a-t-il ajouté. L'eurodéputé socialiste Benoît Hamon a pour sa part jugé "pitoyable"le système d'évaluationt estimant que "le meilleur baromètre" de leur action, ce sont les élections. "Les politiques sont évalués, à la différence des grands managers, aux élections", a déclaré M. Hamon sur LCI. Aurélie Filippetti, députée de Moselle, porte-parole du groupe PS à l'Assemblée nationale, a jugé cette initiative "grotesque" et "dangereuse, parce que la politique n'est pas affaire de chiffre, de quotas et de rendement"

"La saison des notes n'est pas encore arrivée", a pour sa part ironisé le porte-parole du gouvernement. Selon Laurent Wauquiez, le chef de l'Etat a "renouvelé sa confiance totale, pleine et entière au gouvernement" et a conclu à l'adresse de ses ministres par ces mots : "Faites du bon boulot et ne soyez pas fébriles". Il pourrait cependant se révéler difficile pour certains d'entre eux de ne pas être fébrile à la lecture répétée de leur nom dans une presse qui les dit en sursis comme Hervé Morin (Défense), Michèle Alliot-Marie (Intérieur), Michel Barnier (Agriculture), Christine Albanel (Culture), Christine Boutin (Logement), voire Rachida Dati (Justice), jusqu'ici "chouchoute" du chef de l'Etat mais en butte à l'hostilité des magistrats. Dès la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy avait annoncé que ses ministres seraient évalués en fonction de leurs résultats et qu'ils auraient à rendre des comptes.

La politique est un domaine comme les autres, qui doit rendre des comptes à nos concitoyens", avait affirmé jeudi le porte-parole du gouvernement Laurent Wauquiez, en présentant cette nouveauté à la presse. Selon lui, cette démarche a trois objectifs: pouvoir "ajuster le tir", "rendre des comptes sur ce qui change concrètement" et "évaluer chaque ministre". Les "tableaux de bord" pour chaque ministère ont été établis avec l'aide d'un cabinet privé en stratégie, Mars & Co. Mais ce dernier a terminé son travail, et ne participe pas à l'évaluation, a-t-on précisé à Matignon. La démarche a été entamée il y a quatre mois, selon M. Wauquiez, mais sa philosophie n'est pas neuve puisque depuis le projet de loi de finances 2006, chacune des "missions" du gouvernement est assortie d'objectifs et indicateurs, souvent chiffrés, détaillés dans les annexes au projet de loi de finances.

Contacté jeudi, Bercy confirme avoir reçu une trentaine d'indicateurs, comme l'indice des prix dans la grande distribution. Le ministère de l'Education cite parmi les critères retenus à son égard le "nombre d'heures supplémentaires réalisées par les enseignants", "l'accueil des élèves handicapés" ou encore la "progression de l'assouplissement de la carte scolaire". "C'est une grande nouveauté. Ces indicateurs sont dans la droite ligne de la feuille de route" envoyée au ministre de l'Education Xavier Darcos début juillet, note le ministère. "Ca ne nous fait pas peur, au contraire. Ca permet d'évaluer l'action, de mettre en oeuvre ce qu'on nous demande de mettre en oeuvre", a-t-on commenté dans l'entourage du ministre. La ministre de la Culture Christine Albanel sera jugée sur l'"évolution de la fréquentation totale des lieux culturels" et celle de "la fréquentation des musées quand ils sont gratuits", selon une source proche de Matignon. Quant à Brice Hortefeux, ministre de l'Immigration, il sera notamment évalué suivant le "nombre d'étrangers admis au titre de l'immigration de travail". Parmi d'autres critères retenus pour d'autres ministères, une source gouvernementale cite le "taux de consultation ne donnant pas lieu à une prescription de médicaments" pour la Santé, le nombre de brevets déposés pour la Recherche ou le "nombre de dossiers de surendettements" pour le Haut commissaire aux Solidarités actives. L'action de la Chancellerie est évaluée notamment sur le taux d'application de la loi sur la récidive ou sur le nombre d'aménagements de peine, d'après une source judiciaire. "Je ne savais pas que j'allais être évaluée, je l'ai appris à la sortie du conseil" des ministres, a commenté Christine Boutin, ministre du Logement et de la Ville. "Que tous les hommes et les femmes qui cherchent à se loger puissent le faire le plus rapidement possible, c'est le critère principal que je me donne pour m'évaluer moi-même", a-t-elle ajouté.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Comme c'est bête, Hervé va être viré !

Maxime Mangeot a dit…

Je pense que le plus bête n'est pas de licencier (enfin, limoger)des ministres qui sont loin d'être incompétents mais plutôt de le faire en s'appuyant sur des critères subjectifs et numériques...
Et en ce qui concerne Hervé Morin, rien est fait "hieretdemain". Vous feriez peut-être bien de regarder un peu ce qu'il en est aujourd'hui, non ?